ACCÈS AUX SERVICES PUBLICS : FRANCE URBAINE AUDITIONNÉE PAR LE SÉNAT
Le 3 juin, Jean-Luc Tillard, vice-président de la communauté urbaine d’Arras, représentait France urbaine devant la Mission d’information « Faciliter l’accès aux services publics : restaurer le lien de confiance entre les administrations et les administrés », l’occasion de mettre en avant le modèle singulier développé par la Communauté urbaine d’Arras, les apports de l’expérimentation territoire zéro non recours et plus globalement les propositions de France urbaine pour une approche à 360 de l’accès aux services bien au-delà des seules réflexions engagées autour des maisons France services.
Le 3 juin, Jean-Luc Tillard, vice-président de la communauté urbaine d’Arras, représentait France urbaine devant la Mission d’information « Faciliter l’accès aux services publics : restaurer le lien de confiance entre les administrations et les administrés », l’occasion de mettre en avant le modèle singulier développé par la Communauté urbaine d’Arras, les apports de l’expérimentation territoire zéro non recours et plus globalement les propositions de France urbaine pour une approche à 360 de l’accès aux services bien au-delà des seules réflexions engagées autour des maisons France services.

Focus sur le baromètre du non recours au sein de la Communauté urbaine – 16 % des répondants en situation de « non-recours » aux droits sociaux
La Communauté urbaine est engagée dans l’expérimentation Territoire zéro non recours qui regroupe aujourd’hui 39 territoires en France. Le baromètre du non recours lancé en 2024 permet une première analyse des besoins à l’échelle locale.
23 % des répondants s’adressent aux organismes de sécurité sociale et à France Travail pour accéder à leurs droits ou obtenir des informations sur les prestations sociales. 21 % privilégient les services des collectivités (mairies, centre communaux d’action sociale, centres sociaux et services sociaux départementaux), seuls 4 % sollicitent les « Maisons France Services ».
Internet reste le principal canal : 64 % s’y informent et 57 % contactent les administrations en ligne. Globalement, les démarches en ligne sont bien maîtrisées, mais 38 % des personnes interrogées déclarent rencontrer des difficultés administratives. 13 % des répondants déclarent ne pas savoir où d’informer. Ce sont souvent des personnes peu diplômées, de nationalité étrangère, qui ne disposent pas de soutien pour les aider à mobiliser leurs droits. Parmi les répondants, 12 % estiment que la fermeture d’accueils physiques a eu un impact négatif sur leurs droits et prestations.
En zone rurale, les personnes âgées expriment un besoin d’accompagnement. Dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, les obstacles sont parfois liés à un manque d’équipement (ordinateur, scanner, imprimante, etc.). 16 % des répondants se retrouvent ainsi en situation de « non-recours » aux droits sociaux en raison de ces difficultés d’accès.
Simplifier le parcours face aux effets ambigus de la dématérialisation,
La dématérialisation n’apporte pas de réponse concrète aux publics en situation de « non-recours » qui souvent sont les plus précaires.
Une politique « zéro non recours » doit ainsi combiner pour Jean-Luc Tillard :
- la mise en place d’actions « d’aller-vers »,
- le passage à un administration proactive qui permet l’automaticité des droits,
- la formation interinstitutionnelle des professionnels pour bâtir à l’échelle du territoire,
- le décloisonnement des institutions pour favoriser la transversalité et le « sourcing » des publics en situation de « non-recours »,
- un meilleur accès à l’information des usagers en matière d’accès aux droits.
En vue de répondre à ces enjeux une Assistance à la Maîtrise d’Ouvrage a été engagée par la Communauté urbaine. Elle assurera en particulier la réalisation d’une cartographie des systèmes d’information et données, l’étude de l’interopérabilité des outils existants entre organismes, l’analyse des freins techniques et juridiques à la mutualisation des données, la construction d’un socle commun pour l’outil numérique cible.
Vers l’intercommunalité sociale ? Un rôle d’assembleur et de coordinateur, volontairement assuré par la Communauté urbaine
L’EPCI ne dispose pas de la compétence action sociale. Toutefois elle se mobilise pour coordonner certaines politiques publiques afin d’améliorer la qualité de services via certains leviers.
- La Convention Territoriale Globale signée avec la Caisse d’Allocations Familiales pour agir en faveur de la jeunesse, de l’enfance et de la famille.
- Le Contrat Local de Santé et le Conseil Local de Santé Mentale pour garantir des actions en matière de prévention de la santé pour les habitants, déstigmatiser la santé mentale et coordonner le réseau d’acteurs,
- Le Contrat Territorial d’Accueil et d’Intégration pour coordonner les actions des personnes en situation régulière et bénéficiaires du statut de réfugié ou de protection internationale.
- Le logement d’abord pour l’accompagnement des publics fragilisés à l’accès au logement et aux dispositifs d’aides.
- Le point d’accès aux droits pour permettre aux habitants d’être accompagnés en matière d’accès aux droits juridiques et prévenir les violences intrafamiliales.
- La médiation sociale pour garantir une veille et un apaisement social afin de favoriser le bien vivre ensemble.
La Communauté urbaine d’Arras constitue ainsi l’illustration frappante de la diversité des fonctions assumées par le bloc communal en matière d’accès aux services. A rebours de visions parfois exclusivement centrées sur la commune ou le seul département, ce modèle traduit l’effet bénéfique possible d’une vision systémique et coopérative de l’action sociale.
Coordonner, aller vers, expérimenter – trois fonctions du bloc communal pour garantir l’accès aux services
Une fonction de coordination locale et d’activation
Le triptyque commune-intercommunalité-département constitue un noyau indispensable en vue d’activer de manière pertinente les politiques sociales, ainsi dans le cadre du service public départemental de l’autonomie mais également dans les dynamiques d’accompagnement du handicap. Une politique de l’habitat ne peut se faire sans l’intercommunalité. Une démarche d’accompagnement des aînés exige l’articulation entre services départementaux et guichets plus locaux. Le déploiement des politiques d’insertion et la levée des freins à l’emploi constituent un autre exemple. Si l’insertion est largement pilotée par le département en étroite relation avec les services de l’Etat et différents opérateurs dont France travail, la levée des freins à l’emploi relève largement de compétences communales et intercommunales – garde d’enfant, mobilité, logement…
Une approche en proximité visant à garantir un accès universel aux services et une montée en puissance des actions de prévention
Onze villes assument ainsi des compétences déléguées comme la médecine scolaire, les taux des réalisation bilans de santé y atteignent fréquemment 100 %, contre 20 % au niveau national. Certaines collectivités financent ou pilotent directement des centres de santé en régie, renforçant l’offre de soins de proximité. Des partenariats sont noués avec les bailleurs sociaux pour favoriser l’accès aux droits dans les quartiers, les services mobiles se renforcent.
Une fonction de laboratoire de l’action publique via l’expérimentation et l’innovation
L’expérimentation territoire zéro non recours, les démarches lancées dans le cadre de la stratégie pauvreté puis via les pactes locaux des solidarités, le pilotage métropolitain de dispositifs structurants en vue de soutenir la jeunesse, l’appel à manifestation d’intérêt lancé par la Caisse nationale pour la solidarité et l’autonomie en vue de prévenir la perte d’autonomie en quartier prioritaire de la politique de la ville constituent autant d’initiatives favorisant une mutation du service.
Accès aux services – 9 propositions issues des travaux engagés à France urbaine
Issues des travaux engagés par France urbaine ces dernières années, neuf propositions viennent illustrer l’approche à 360 déployée par l’association en matière d’accès au service, faisant écho plus simplement au vécu de chaque citoyen et citoyenne. Loin d’être limitative, cette liste ne constitue qu’un échantillon donnant à voir les défis auxquels sont confrontés les territoires urbains pour répondre à une demande sociale croissante.
1.Un observatoire des moyens en quartier prioritaire de la politique de la ville pour garantir l’équité territoriale dans le déploiement des moyens de droit commun (éducation, sécurité, justice…)
2.Une juste compensation de la médecine scolaire déléguée aux villes
3.Une révision du modèle tarifaire des centres de santé non lucratifs dans le cadre des négociations engagées avec la CPAM et du futur PLFSS, ce modèle étant aujourd’hui en péril
4.Une approche en coûts complets des politiques de prévention et d’insertion ainsi de territoires zéro chômeur de longue durée ou de territoires zéro non recours en vue de garantir la pleine prise en compte du coût social et global des politiques d’accompagnement
5.Un soutien renforcé aux politiques de prévention et d’accompagnement à la jeunesse au sein du pacte local des solidarités en vue de faire monter en puissance les métropoles et communautés urbaines
6.Une délégation des dispositifs de soutien et un appui renforcé sur le bloc communal pour assurer la mise en accessibilité des ERP de catégorie 5 et la mobilisation du fonds territorial d’accessibilité,
7.Une approche territorialisée de la mobilité : Les grandes intercommunalités et métropoles doivent bénéficier d’un soutien renforcé pour répondre à la demande croissante de mobilité durable.
8.Un soutien à l’offre en logement social : un abondement suffisant du fonds national des aides à la pierre, une gouvernance partagée et efficace, une programmation pluriannuelle ambitieuse, un choc de production de logements sociaux
9.Une prise en compte renforcée du bloc communal en matière d’insertion et d’emploi intégrant la sanctuarisation des organismes intermédiaires du FSE+ métropolitains et la pleine prise en compte des plans locaux de l’insertion et de l’emploi (PLIE) dans les comités locaux pour l’emploi
Accès aux services public – ils l’ont fait !
1/Coordonner, former
Coordination des dispositifs d’action publique par le bloc communal
- pilotage de territoire zéro non recours : Communauté urbaine d’Arras, Métropole de Dijon, plus globalement 39 territoires sont engagés dans l’expérimentation
- pilotage métropolitain du Contrat d’engagement des jeunes – jeunes en rupture – Grenoble Alpes métropole
- pilotage du COPIL vieillissement – Le Havre
- groupe de de travail autour de l’accès au droit piloté par le Service du développement social urbain de la ville – Bordeaux
- coordination du COPIL France Services qui réunit les Maisons, les opérateurs et le pilotage des Conseillers numériques – Communauté urbaine d’Arras
- Mise en réseau des travailleurs sociaux – CCAS de Mulhouse, Collectivité Européenne d’Alsace
Déploiement de formations interinstitutionnelles
- Formation du réseau local autour des enjeux de vieillissement – Le Havre
- Formation de l’ensemble des acteurs de la prescription et de l’orientation à destination de la jeunesse dans le cadre du déploiement du revenu solidarité jeunesse – métropole de Lyon
- Formation de l’écosystème en santé sur l’accompagnement des situations de vulnérabilité : lab santé précarité – métropole du Grand Nancy
2/Repérer, adapter, prévenir, aller vers
Mobiliser la data
- Repérage des personnes âgées en situation de fragilité et d’isolement, conventionnement avec le département – Rennes
- Mise en place d’une étude en vue de construire un outil partenarial commun – Communauté urbaine d’Arras
Déployer des dispositifs mobiles
- équipes de rue – pilotée par un collectif associatif en lien avec We Ker et Breizh Insertion Sport équipe composée de deux éducateurs de prévention spécialisée, une conseillère en insertion professionnelle, un éducateur socio-sportif – Rennes métropole
- équipe mobile gériatrique – cofinancement ARS, ville de Nantes
- déploiement d’entretiens en prévention : Paris habitat expérimente depuis avril 2025 le dispositif « Vos droits en direct », en vue de lutter contre le non-recours des locataires par un travail d’aller vers et de coordination des procédures d’accès aux prestations sociales – Paris
Soutenir un service public universel en santé
- piloter un centre de santé : Saint Denis, Grenoble…
- assumer la médecine scolaire au niveau communal : 11 villes délégataires en santé scolaire
- assurer une fonction de détection précoce en crèche : Limoges, Versailles…
Faire de la santé un levier d’entrée dans un parcours d’accompagnement
- mobilisation de psychologues pour faciliter l’entrée en parcours d’insertion ou la levée des freins à l’emploi : Nice Côte d’Azur, Rennes métropole
Renforcer l’accessibilité des services et aux droits
- financement de postes de travailleurs sociaux en commissariat
- soutien à la mise en accessibilité des établissements recevant du public de catégorie 5 (dont les cabinets médicaux) – mobilisation des ambassadeurs du handicap – Toulouse