JOURNÉE D’ÉCHANGES SUR LES MEUBLÉS DE TOURISME À BAYONNE
En écho à la journée organisée à La Rochelle le 4 décembre 2023, veille de l’examen de la Proposition de Loi (PPL) transpartisane portée par les députés Annaig Le Meur et Inaki Echaniz, France urbaine et la Communauté d’agglomération du Pays Basque (CAPB) ont organisé vendredi 7 juin dernier une nouvelle journée de travail et d’échanges entre élus locaux, parlementaires et représentants de la société civile. Les deux députés rapporteurs de la PPL étaient présents, ainsi que la sénatrice Frédérique Espagnac.
Alors que 4,1 millions de personnes sont non ou mal logées, la prolifération des meublés de tourisme nourrit la crise du logement, contribuant à la raréfaction de l’offre locative de longue durée et à l’augmentation des loyers. Étudiants, saisonniers ou familles monoparentales sont particulièrement impactés. Les entreprises peinent à recruter en raison des freins croissants à l’accès au logement. Jean-Pierre Istre, président de l’Union des Métiers de l’Industrie Hôtelière (UMIH) pour le Pays Basque, a souligné que les métiers du tourisme étaient parmi les plus touchés par les difficultés de recrutement que provoquent les tensions sur le marché du logement, d’autant que les hôteliers font face à des obligations et réglementations bien plus importantes que les autres hébergeurs.
Cette croissance des meublés modifie en profondeur le paysage et les usages touristiques des grandes villes, comme des territoires plus ruraux, modifiant en profondeur l’offre de commerce de proximité (à La Rochelle, 40 % des demandes d’ouvertures de commerce concernent la restauration) et provoquant des tensions entre habitants et visiteurs. Tous ces phénomènes sont présents au Pays Basque, comme l’a rappelé Jean-René Etchegaray, maire de Bayonne et président de la CAPB.
Sa collectivité a mis en place un règlement encadrant la création de meublés de tourisme, provoquant une diminution des autorisations temporaires. Elle prépare la mise en œuvre d’un encadrement des loyers, au 1er janvier 2025, malgré la complexité du dispositif actuel. Elle soutient le logement étudiant, permettant l’ouverture de 504 logements dédiés en 2024. C’est bien la mobilisation de tous les outils d’une politique du logement qui est nécessaire, et la CAPB attend de l’exécutif national qu’il renforce la compétence des Établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) plutôt qu’il détricote la loi Solidarité et renouvellement urbain (SRU)…
Les échanges furent donc l’occasion pour la centaine de participants, dont des représentants des habitants (l’association Alda) ou des professionnels du tourisme, de rappeler la demande récurrente des acteurs locaux : être mieux outillés pour encadrer les meublés de tourisme au regard des caractéristiques touristiques locales et des marchés territoriaux du logement. Il vaut mieux encadrer qu’interdire, comme le font plusieurs métropoles étrangères.
L’occasion aussi pour Marie Nedellec, adjointe au maire de La Rochelle, d’évoquer les attentes principales des territoires sur la régulation des meublés de tourisme :
- l’aboutissement des dispositions prises pour mettre fin à la niche fiscale dont bénéficient les locations saisonnières de meublés touristiques de courte durée ; sa mise en œuvre sur les revenus perçus en 2024,
- l’interdiction de la location de passoires thermiques via les plateformes touristiques ; cela suppose de revenir au délai de cinq ans pour les logements classés D (stock) et DPE classes A à D (flux) pour obtenir le changement d’usage,
- la possibilité pour les maires de plafonner jusqu’à 60 jours, en fonction des tensions locales sur le marché du logement, le nombre de jours durant lesquels les meublés sont ouverts à la location,
- l’autonomie de régulation plus importante pour les collectivités, par la mise en place de mesures de compensation,
- la simplification de la lutte contre la sous-occupation par l’unification de la fiscalité des logement vacants (TLV et THLV), mesure validée par le Sénat (au PLF) mais rejetée par le Gouvernement.
L’ensemble de ces dispositions, indolores pour le plus grand nombre, permettra de soutenir une activité touristique plus équitablement répartie sur le territoire national, au service des territoires concernés, et enrayant spéculation et abus. Sans résoudre à elles seules les tensions critiques que connait le marché du logement, elles contribueront à donner aux maires une capacité à agir localement et sereinement.
Le prochain projet de loi de finances (PLF) doit être une étape supplémentaire vers une meilleure régulation, notamment par un approfondissement du travail mené sur la fiscalité des revenus locatifs. Frédérique Espagnac a pointé la nécessité de limiter le seuil d’abattement pour les plus-values.
Une véritable décentralisation de la politique du logement reste à mettre en œuvre, intégrant des dispositions sur les meublés, la remise sur le marché accéléré pour les biens vacants ou ”sans maîtres”, la garantie universelle des loyers ou la régulation des résidences secondaires, la remise en question du régime réel.
Comme l’ont souligné plusieurs intervenants, la régulation nécessite des moyens juridiques et des agents pour contrôler la mise en œuvre des nouvelles réglementations. Cette ingénierie doit se partager et nourrir des coopérations territoriales renforcées.