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POUR UN PLAN NATIONAL ET EUROPÉEN AMBITIEUX CONTRE LE TRAFIC DE DROGUE

Le 21 août, le quartier Pissevin, en périphérie de Nîmes, a été le théâtre de deux fusillades, entrainant la mort d’un enfant de 10 ans et d’un homme de 18 ans. D’autres grands centres urbains viennent aussi de connaitre des violences dramatiques liées aux trafics. Au niveau national, plus de 70 victimes liées au trafic de drogue ont déjà été recensées par le ministère de l’Intérieur depuis le début de l’année.

Alors que se multiplient la consommation et le commerce des substances illicites et leurs produits de synthèses, les élus locaux subissent l’évolution des marchés et font face à de nombreux défis. Il n’y a pas un mois où l’actualité n’est pas rythmée de faits divers sur fond de trafic de stupéfiants. Ce fléau n’est plus spécifique à certaines grandes villes. Les territoires d’outre-mer deviennent des plateformes d’acheminement des marchandises illicites. Les villes moyennes et les petites villes deviennent aussi le théâtre de trafics et de nuisances voire de règlements de comptes.

Si le trafic existait déjà, sa forme et le degré de violence observés sont nouveaux, notamment chez les mineurs. Le grand banditisme, la corruption et la criminalité organisée sont désormais banalisés. La circulation et l’utilisation d’armes lourdes, les guerres de territoires ou encore du blanchiment d’argent démontrent une réelle professionnalisation du crime.
Les trafiquants viennent s’installer et conditionner leurs marchandises dans les villes étant réputées calmes. Il est plus facile de s’implanter là où il n’y a pas encore de délinquance, pas de concurrence, moins de forces de police et de dispositifs de surveillance. Ils s’appuient sur l’usage des réseaux sociaux ainsi que des organisations de petits dealers mobiles, avec des rémunérations importantes et un turn-over possible.

Les annonces du Gouvernement ainsi que l’augmentation des budgets alloués à la sécurité intérieure et la justice vont dans le bon sens. Pour autant, malgré des saisies régulières réalisées, jamais l’offre de drogue en Europe n’a été aussi importante qu’aujourd’hui.

On ne parle plus seulement de cannabis. La cocaïne et l’héroïne sont importées en masse. C’est un véritable système qui sert une véritable économie. L’Insee estime à 4,2 milliards d’euros le montant dépensé par les Français en 2020 pour s’approvisionner en cannabis, cocaïne, héroïne, crack et autres produits stupéfiants, soit deux fois plus qu’en 2009. Plus de 3000 points de deals sont identifiés notamment dans les espaces urbains.

Depuis de nombreux mois, nous alertons sur la lenteur des enquêtes, le manque de moyens et la gravité de la situation. Nos concitoyens, qui en sont les victimes, s’interrogent et nous interpellent. En première ligne, nous restons pro-actifs au quotidien. Si les élus locaux n’ont pas de prérogatives pour lutter directement contre le trafic de drogue, ils mènent en responsabilité des politiques locales fortes en matière de sécurité, de tranquillité publique, de prévention de la délinquance et des conduites addictives.
Nous continuerons à être aux côtés des forces régaliennes pour installer des dispositifs dans l’espace public et faciliter leur action. Cette lutte est un travail complexe et minutieux, qui mobilise des ressources et qui prend du temps. De fait, nous appelons à :

  1. Lancer un véritable plan national et européen de lutte contre le trafic de drogue, qui s’intéresse aux gains financiers, leur rentabilité et leur traçabilité. Une réflexion à l’échelle communautaire doit être aussi menée, avec une évaluation globale pour des actions coordonnées.
  2. Généraliser les enquêtes sur le patrimoine et s’attaquer pleinement au portefeuille des trafiquants. Il faut aller plus loin sur le gel et la saisie des avoirs criminels en ajoutant aux maisons, voitures ou bijoux, les sommes phénoménales générées par ces trafics.
  3. Territorialiser davantage les moyens de la Justice en fonction de la pression démographique et du nombre de délits constatés et rapprocher les procureurs de la République des élus locaux, en rendant plus opérationnel le continuum de sécurité, avec une task force rassemblée autour du préfet, du procureur de la République et du maire, dans le cadre d’un réel échange d’informations et de l’installation d’un service dédié au démantèlement des réseaux.
  4. Faire chuter la demande, par la prévention et une politique de santé publique pérenne. On ne doit pas choisir entre prévention, éducation et fermeté. Il est temps d’activer plus de ressources et de mobiliser l’ensemble des leviers, notamment l’Education nationale, les professionnels de santé, les associations, les services de protection de l’enfance et les parents.
  5. Accompagner davantage les collectivités et généraliser les expérimentations. Certaines grandes villes testent et œuvrent en lien avec la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca). Il faut aussi rendre plus opérationnelle la stratégie interministérielle dédiée. Les plans, nationaux et locaux, établis en concertation doivent être plus concrets et plus efficaces.

Les policiers et les magistrats ne pourront, à eux seuls, pallier l’ampleur de ce phénomène qui sape notre modèle républicain. Notre pays a l’une des législations pénales les plus répressives d’Europe en la matière. Pourtant, la situation ne s’améliore pas. Il est temps de briser cette spirale infernale de violence issue des trafics.

Lutter contre le trafic de drogue, c’est agir pour la sécurité des Français. C’est aussi agir pour la santé publique : les conduites addictives interviennent dans 30 % des décès avant 65 ans. L’usage de la drogue a aussi des incidences sociales du fait des marginalisations, des handicaps et de la souffrance psychiatrique qu’elle entraîne.

Réunis au sein de France urbaine, nous, élus des grandes villes, agglomérations et métropoles, avons des propositions concrètes, qui dépassent les clivages politiques, les déclarations tribuniciennes, les fausses promesses et les solutions hâtives. Le Gouvernement doit s’en saisir.

Les élus signataires :

  • Johanna ROLLAND, maire de Nantes, présidente de Nantes Métropole, présidente de France urbaine
  • Jean-Luc MOUDENC, maire de Toulouse, président de Toulouse Métropole, premier vice-président de France urbaine
  • Eric PIOLLE, maire de Grenoble, deuxième vice-président de France urbaine
  • Nathalie APPERE, maire de Rennes, présidente de Rennes Métropole
  • Joel BRUNEAU, maire de Caen, président de Caen-la-Mer, trésorier de France urbaine
  • Alain ANZIANI, maire de Mérignac, président de Bordeaux Métropole
  • Martine AUBRY, maire de Lille
  • Frédéric AUGIS, maire de Joué-lès-Tours, président de Tours Métropole Val de Loire
  • Jeanne BARSEGHIAN, maire de Strasbourg
  • Olivier BIANCHI, maire de Clermont-Ferrand, président de Clermont Auvergne Métropole
  • Michel BISSON, président de Grand Paris Sud
  • François CUILLANDRE, maire de Brest, président de Brest Métropole
  • Jean-François DEBAT, maire de Bourg-en-Bresse, président de la Communauté d’agglomération de Bourg-en-Bresse
  • Michaël DELAFOSSE, maire de Montpellier, président de Montpellier Méditerranée Métropole
  • Emmanuel DENIS, maire de Tours
  • Grégory DOUCET, maire de Lyon
  • Christian ESTROSI, maire de Nice, président de la Métropole Nice Côte d’Azur
  • Christophe FERRARI, maire de Pont-de-Claix, président de Grenoble-Alpes Métropole
  • Brigitte FOURE, maire d’Amiens
  • Jean-Paul FOURNIER, maire de Nîmes
  • Alain GEST, président d’Amiens Métropole
  • François GROSDIDIER, maire de Metz, président de l’Eurométropole de Metz
  • Serge GROUARD, maire d’Orléans, président d’Orléans Métropole
  • Pierre HURMIC, maire de Bordeaux
  • Florence JARDIN, présidente de Grand Poitiers
  • Jean-Paul JEANDON, maire de Cergy, président de la Communauté d’agglomération de Cergy-Pontoise
  • Sophie JOISSAINS, maire d’Aix-en-Provence
  • Fabian JORDAN, maire de Berrwiller, président de Mulhouse Alsace Agglomération
  • Mathieu KLEIN, maire de Nancy, président de la Métropole du Grand Nancy
  • Didier LAGUERRE, maire de Fort-de-France
  • Grégoire DE LASTEYRIE, maire de Palaiseau, président de la Communauté d’agglomération Paris-Saclay
  • Frédéric LETURQUE, maire d’Arras, président de la Communauté urbaine d’Arras
  • David LISNARD, maire de Cannes
  • Fabrice LOHER, maire de Lorient, président de Lorient Agglomération
  • Emile-Roger LOMBERTIE, maire de Limoges
  • Michèle LUTZ, maire de Mulhouse
  • David MARTI, maire du Creusot, président de la Communauté urbaine du Creusot-Montceau
  • Francois DE MAZIERES, maire de Versailles, président de la Communauté d’agglomération Versailles Grand Parc
  • Nicolas MAYER-ROSSIGNOL, maire de Rouen, président de la Métropole Rouen Normandie
  • Georges MOTHRON, maire d’Argenteuil
  • Benoit PAYAN, maire de Marseille
  • Gael PERDRIAU, maire de Saint-Etienne, président de Saint-Etienne Métropole
  • Joaquim PUEYO, maire d’Alençon, président de la Communauté urbaine d’Alençon
  • François REBSAMEN, maire de Dijon, président de Dijon Métropole
  • Johanna ROLLAND, maire de Nantes, présidente de Nantes Métropole, présidente de France urbaine
  • Arnaud ROBINET, maire de Reims
  • Cedric VAN STYVENDAEL, maire de Villeurbanne
  • Jean-Marc VERCHERE, maire d’Angers, président d’Angers Loire Métropole
  • Anne VIGNOT, maire de Besançon, présidente de Grand Besançon Métropole
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