MA PRIME ADAPT’ : LES ÉLUS DES GRANDES VILLES, AGGLOMÉRATIONS ET MÉTROPOLES APPELLENT À GARANTIR UN DISPOSITIF PLEINEMENT INCLUSIF
Alors que les concertations ont commencé en décembre autour du dispositif Ma Prime Adapt’, France urbaine relève plusieurs points de vigilance.
L’adaptation de l’habitat est un enjeu majeur dans un contexte de vieillissement de la population. La décennie 2020-2030 sera celle d’une augmentation massive du nombre des personnes âgées de 75 à 84 ans. Au nombre de 4 millions en 2020, ils seront 6 millions en 2030, comme rappelé par Luc Broussy, en 2021, dans le rapport « Nous vieillirons ensemble » qui dessinait les contours d’une nouvelle aide à l’adaptation de l’habitat.
Les concertations sont lancées depuis décembre 2022 autour du dispositif Ma Prime Adapt’. Le modèle mis au travail, à destination des plus modestes, serait ouvert sans condition de groupe iso-ressources (GIR) à compter de 70 ans. Il vise à fusionner et simplifier les dispositifs déjà mis en œuvre par l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) et la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) ainsi que le crédit d’impôt dédié à l’adaptation de l’habitat. Les contours sont en cours de définition. Une vigilance devra être apportée aux effets de la transition entre les aides actuelles et l’aide à venir, aussi bien sur les taux de subventionnement que des critères d’éligibilité.
France urbaine entend mettre à profit les enseignements tirés de la mise en place de MaPrimeRénov’ mais également mettre en avant l’expertise acquise par les territoires délégataires de l’aide à la pierre, a fortiori des autorités organisatrices de l’habitat ou plus largement des territoires ayant engagé des démarches coordonnées articulant rénovation énergétique et adaptation.
Un impératif de territorialisation…
La multiplication des initiatives mettant en jeu l’habitat nécessite une articulation des interventions en vue de garantir un cadre lisible pour le citoyen. Deux écueils sont ainsi à éviter :
- la juxtaposition de process d’instruction et de financement étanches, l’un territorial piloté par les intercommunalités et collectivités, l’autre national piloté par une plateforme centralisée ;
- la mise en concurrence des dispositifs au niveau territorial, chaque dispositif national donnant lieu à la désignation de système d’accompagnement ad hoc, accompagnement à la rénovation énergétique, accompagnement à l’adaptation, précisément dans des territoires ayant déjà mis en place des outils à la faveur des réglementations et initiatives précédemment lancées (OPAH PIG…).
Il s’agit de penser la mobilisation des outils existants en les adaptant : inscrire le nouveau dispositif dans le cadre de la délégation des aides à la pierre, sur le modèle de MaPrimeRénov’ « sérénité », ou encore penser des conventionnements territoriaux en vue d’articuler au niveau territorial les outils de guichet, diagnostic, accompagnement, information du public.
… sous réserve d’y consacrer les moyens adéquats
Le coût de Ma Prime Adapt’ ne se limite pas au financement de l’aide individuelle. C’est un processus d’ensemble qu’il s’agit de financer : fonctions d’instruction, d’ingénierie et d’accompagnement. Le succès du dispositif dépend ainsi également de la capacité de le financer à hauteur de son coût.
L’opportunité de penser une approche globale de l’habitat
Les dispositifs mis en place ces dernières années constituent une opportunité de repenser l’accompagnement des personnes en mettant l’habitat au cœur de cet accompagnement, suivant en cela les principes déjà posés par la commission santé de France urbaine : démarches « One health » et responsabilité des territoires urbains en matière de santé environnementale. Il s’agit de penser un accompagnement pluridisciplinaire intégrant certaines compétences clés en capacité d’articuler une connaissance des structures de l’habitat, des compétences d’ergothérapeute et la prise en compte de situations de précarité et de vulnérabilité.
Penser le continuum d’information et d’accompagnement
Ma Prime Adapt’ a pour mérite de mettre en avant le caractère central de l’habitat dans une démarche de prévention. La communication sur un tel dispositif peut être un vecteur puissant de sensibilisation pour l’ensemble des ménages. Le dispositif toutefois intègre à ce stade des critères d’âge et de critères de ressource restreints. Il s’agit d’examiner comment un dispositif, tout en restant suffisamment ciblé, peut garder des visées universalistes, à l’exemple de MaPrimeRénov’, en vue de faire levier sur l’ensemble de la population.
L’enjeu est de penser un continuum d’accompagnement et de prévention à destination de tous les publics mais également dans le temps en s’attachant à certains moment clés que sont la retraite, le déménagement ou l’incapacité précoce, tout en mobilisant l’ensemble des acteurs impliqués, comme la médecine de ville, la médecine du travail ou les caisses de retraite.
Garantir un dispositif pleinement inclusif : penser l’enjeu des financements et de l’inclusion numérique
Ciblée sur des publics modestes, parfois vulnérables, une telle aide doit être accompagnée d’une réflexion sur les facilités de financement (micro-crédit, prêt à taux zéro, avances de trésorerie…) et l’accompagnement humain face à des publics susceptibles d’être freinés par la complexité administrative, l’interface numérique et le risque d’escroquerie.
Mobiliser la filière bâtiment et renforcer l’incitation à l’élaboration d’une offre adaptée
L’adaptation de l’habitat nécessite une sensibilisation forte de l’ensemble des acteurs de la filière et un renforcement des formations à destination des architectes aussi bien que des entreprises du bâtiment. Au-delà d’une réponse aux inévitables tensions sur le marché que va générer l’afflux de demande d’adaptation, le renforcement de ces formations a aussi vocation à favoriser en amont des démarches architecturales favorables à tous les publics, dont les publics âgés ou en situation de handicap temporaire ou pérenne. Il s’agit ainsi de donner corps à une réelle dynamique d’accessibilité universelle au-delà des seuls référentiels existants. Ainsi, l’objectif à terme est de faire émerger une filière à haute valeur ajoutée, porteuse d’emplois non délocalisables qui permettra de rénover et réhabiliter plus vite, mieux, moins cher et dans des délais resserrés.