Actualité Stratégies alimentaires territoriales

FRANCE URBAINE POURSUIT SON PLAIDOYER SUR L’ALIMENTATION

À l’occasion d’un webinaire tenu le 24 janvier devant près de 140 participantes et participants issus de diverses régions d’Europe, France urbaine représentée par Audrey Pulvar, adjointe à la Maire de Paris, chargée de l’Agriculture, de l’Alimentation Durable et des Circuits Courts de Proximité et Christian Grancher, vice-président de la Communauté urbaine Le Havre Seine Métropole, chargé de l’Agriculture et de l’Alimentation, co-présidents de la Commission Stratégies alimentaires territoriales de France urbaine présentait, aux côtés des réseaux Agores, Eating City, de la cellule Manger demain (région wallonne), du centre Lascaux sur les transitions, des villes de Bruxelles et Mouans-Sartoux, un projet de déclaration commune en faveur d’un nouveau règlement systèmes alimentaires durables en Europe.

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Ce texte constitue l’aboutissement de plusieurs mois de réflexions en vue de proposer un nouveau modèle juridique permettant d’articuler des enjeux de résilience territoriale et l’achat public.
Et si demain on pouvait associer de manière évidente restauration des sols, santé de l’eau, de l’air relocalisation des outils de production pour motifs stratégiques au sein de nos marchés publics ?
Et si la rémunération des services écosystémiques faisait désormais partie intégrante du financement de nos achats alimentaires ?

Un texte porté par des intuitions communes : la place de l’échelon infranational, le rôle des collectivités, l’approche en santé globale

La conviction que l’alimentation peut constituer un objectif fédérateur, le lieu d’un récit positif et d’alliances fertiles entre territoires de production et territoires de consommation, en espaces ruraux et espaces urbains.
France urbaine, composée à plus de 50% de territoires classés comme non urbaines, porte de longue date ce principe d’alliance des territoires qui trouve à s’incarner dans la commande publique, dans la mutation du rôle des marchés d’intérêt nationaux, dans des chartes de réciprocité, des espaces de coopération interterritoriaux, des projets alimentaires territoriaux, des stratégies de soutien à l’installation etc.

À l’image des projets alimentaires territoriaux, des modèles de contractualisation territoriale se dessinent dans d’autres pays à l’exemple du territoire de Namur témoignant sur ses actions (modèle des Conseils des politique alimentaire, ou encore des ceintures alimentaires).
Cette approche territoriale constitue un enjeu majeur pour le juriste Fabrice Riem, rappelant l’importance de (re)faire de l’alimentation l’objet d’un choix démocratique éclairé.
Pour Fabrice Riem, “il faut tendre justice aux collectivités locales” (…) “qui concrétisent le droit de chacun à une alimentation adéquate” et “sont en train de réaliser un tour de magie sociale“, en pensant une démocratisation locale par l’alimentation où s’invente le service public de demain, en pensant ensemble l’accès à l’eau, aux transports publics, aux cantines.

La loi EGALIM en France a fait de la restauration collective publique un levier pour une transformation de nos systèmes alimentaires et agricoles.
Les fonds du plan de relance ont, quant à eux, largement contribué à la montée en puissance des projets alimentaires territoriaux.
Si ces stratégies sont une singularité française rappelle Maurizio Mariani, directeur général d’Eating City, on peut souligner aussi l’implication forte de l’Italie sur ce terrain. Cette sensibilité se fait jour partout en Europe ce que donnent à voir les initiatives du réseau SchoolFood4Change, programme massif tourné vers une cible de 600 000 élèves à travers l’Europe.

Le rôle structurant et pionnier des politiques territoriales et de la restauration collective publique et l’implication forte des collectivités territoriales très directement concernés par cet enjeu en particulier les zones urbaines : concernées comme pôle de consommation, comme fournisseurs de repas en masse pour la restauration, comme acteurs en charge de la gestion de l’eau, de l’air des sols, mais également comme territoires denses soumis à des vulnérabilités : vulnérabilités environnementales et vulnérabilités logistiques. Les villes responsables des deux tiers des gaz à effet de serre, doivent aussi être les solutions et les fers de lance de nouveaux modèles de consommation.

Cette place spécifique du niveau infra national se justifie par des compétences spécifiques, des facultés de régulation démocratique mais également une capacité à penser et mettre en cohérence l’usage concurrentiel des sols soumis à des tensions en termes de besoins : alimentation, énergie, bois de construction, logement…

Une articulation entre santé globale (one health), agriculture, alimentation et sécurité stratégique : vulnérabilité environnementale et vulnérabilité logistique constituent les deux facettes d’une même pièce, penser la résilience d’un territoire aux chocs exige une réflexion de court terme sur approvisionnement et stockage mais exige tout autant une réflexion de moyen et long terme sur la mutation des modèles de production en vue de réduire l’exposition de nos territoires aux risques environnementaux, climatiques et géopolitiques. Une démarche de santé globale envisage par ailleurs l’agriculture et l’alimentation au service de la santé humaine, environnementale, animale et veille à prendre en compte aussi bien les enjeux de santé des consommateurs que la qualité des conditions de travail et la juste rémunération des producteurs.

L’opportunité de renouveler un cadre de la commande publique qui connaît aujourd’hui certaines limites en tirant profit des dynamiques à l’oeuvre

Le règlement sur les systèmes alimentaires durables en Europe doit constituer une opportunité pour rénover le cadre de la commande publique sans attendre une évolution des directives marchés. En effet si des initiatives intelligentes émergent partout en Europe pour mieux maîtriser les finesses juridiques, des entraves subsistent.

Benoit Hellings, 1e échevain de la ville de Bruxelles chargé du climat et des sports, et président des cuisines bruxelloises assurant la distribution publique de 5,5 millions de repas, témoigne des effets pervers des procédures pesant sur les grands volumes sur la stratégie de relocalisation menée par la ville dans le cadre de son plan climat :  difficulté dans la traçabilité des denrées, offre de pommes de Nouvelle Zélande, phénomènes de concentration au bénéfice de structures intermédiaires susceptibles d’influer sur les prix et rendant plus complexe le positionnement d’acteurs locaux ne pouvant fournir qu’en quantités réduites…
Relocaliser conformément aux orientations de nombreuses études prospectives pour contribuer à une meilleure diversification des productions, constitue un casse-tête. Pallier les aléas sur les volumes et sur les prix dans le cadre de l’achat public reste également une difficulté.

Le pari de cette initiative commune est donc de repenser notre rapport à l’alimentation au sein d’un nouveau règlement.
Demain, dans le cadre d’une gouvernance partenariale à l’image de la gouvernance des projets alimentaires territoriaux et des communautés d’énergie renouvelable, un pouvoir adjudicateur se fondant sur une stratégie de résilience territoriale définissant les besoins du territoire – à l’image des travaux prospectifs réalisés dans de nombreux territoires urbains – devra pouvoir avoir le libre choix de la procédure d’achat pour 50% du volume annuel des denrées en euros HT.

Une telle proposition respecte les principes fondamentaux de la commande publique : transparence, libre accès, publicité.
C’est bien l’objet du marché qui est désormais apprécié de manière extensive : un marché de denrée n’est plus exclusivement un marché d’achat de denrée, mais bien la brique d’une stratégie plus large au bénéfice de l’ensemble d’un territoire et in fine au bénéfice de la résilience globale de l’union européenne.

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