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CONGRÈS USH 2023 : LE LOGEMENT SOCIAL COMME AMORTISSEUR DE LA CRISE ?

Du 3 au 5 octobre 2023 s’est tenu à Nantes le congrès annuel de l’Union sociale de l’habitat (USH).

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Placés sous le thème de la transition écologique et énergétique, les débats du congrès de l’USH, à Nantes, visaient à illustrer les moyens de “transformer nos façons de construire, de rénover, de consommer et de produire de l’urbanité” comme l’a rappelé Emmanuelle Cosse, présidente de l’USH. Au-delà de ces enjeux, c’est bien la capacité des bailleurs sociaux à porter des stratégies d’innovations technique et sociale qui est ressortie, montrant leur volonté et mobilisation face à une crise généralisée du logement.

Des débats riches, une vision transversale de la transition écologique

Pendant 3 jours, plénières et ateliers ont permis de poser le cadre d’une politique de développement du logement social ambitieuse et adaptée aux besoins réels de la société. Si aujourd’hui l’USH estime le besoin en construction neuve à 180.000 logements par an (contre une production légèrement inférieure à 98 000 unités en 2022), l’ensemble des acteurs pointe le désengagement de l’État dans le financement du logement social, malgré des enjeux et des problématiques que la transition écologique et énergétique renforce au quotidien :

  • Inclusion des publics jeune, senior ou encore les plus modestes dans le parc ;
  • Développement de produits résidentiels adaptés et expérimentation de formes résidentielles nouvelles intégrées au parc classique ;
  • Maximisation des moyens pour des réhabilitations thermiques et énergétiques exemplaires.

Confrontés à une crise de l’offre profonde et une explosion de la demande, les bailleurs doivent réinventer un modèle de production agile. Ce principe d’agilité sera d’autant plus atteignable qu’il sera conçu dans un cadre territorialisé.

La décentralisation des politiques du logement comme levier de la transition

Lors d’une plénière consacrée à l’actualité du logement et de la décentralisation, Nathalie Appéré, maire de Rennes, présidente de Rennes Métropole, secrétaire générale de France urbaine, a rappelé la nécessité que les collectivités locales puissent coordonner leurs efforts pour un développement équilibré du logement sur leur territoire. Compétentes pour l’animation des conférences intercommunales du logement (CIL), la formalisation des conventions intercommunales d’attribution (CIA), des programmes locaux de l’habitat et des plans locaux d’urbanisme (intercommunal), les territoires sont les plus à même de définir avec finesse leurs besoins en matière de développement résidentiel, intimement lié à leur dynamique de développement économique (40 % des entreprises pointent aujourd’hui leur difficulté à loger leurs salariés) et à leur cohésion sociale.

Cet impératif de cohérence, on le retrouve à travers la mise en application du zéro artificialisation nette (ZAN) qui implique une identification très fine des fonciers, de leur réceptivité et de leur capacité à accueillir des programmes en cohérence avec les objectifs de limitation de l’expansion urbaine. L’exercice est complexe et implique que l’État réaffirme sa volonté de mobiliser des moyens pérennes, un cadre d’objectifs qui s’applique à tous les territoires, et revienne à une logique de logement social universaliste.

Une réponse ministérielle en deux temps… vers une loi logement ambitieuse ?

Patrice Vergriete, ministre du logement, a en conclusion porté plusieurs annonces qui donnent aux acteurs du logement social une visibilité sur les court et moyen termes.
Dans le cadre du PLF 2024 et des discussions engagées avec les partenaires financiers du logement social, un protocole a été signé entre l’USH et le gouvernement. Il porte des mesures qui répondent – certes partiellement – aux blocages identifiés. Ces “engagements pour la transition écologique et la production de logements sociaux 2024-2026” permettent la mobilisation de 1,2 milliard d’euros sur 3 ans pour la rénovation de 120.000 logements sociaux, l’optimisation des financements au titre de la certification d’économie d’énergie, la prorogation de l’éco-prêt à 6 milliards d’euros sur la période 2024-2030 et l’application de taux identiques à cet éco-prêt pour les changements de vecteurs énergétiques.
Surtout le taux du livret A sera maintenu à 3 % jusqu’à début 2025 alors que les indexations diverses devaient le porter à plus de 4 %. Une enveloppe de 8 milliards d’euros de prêts bonifiés destinés au financement des PLAI et PLUS est mobilisée par la Banque des territoires pour un équivalent-subvention de 650 millions d’euros, à laquelle il convient d’ajouter la mobilisation de quasi-fonds propres pour 400 millions d’euros. Enfin, Action Logement poursuivra sa politique de financement des LLS et LLI et de bonification des prêts et de subvention dans le cadre des NPNRU et d’accompagnement du programme Action Cœur de Ville.

La prorogation du dispositif « seconde vie » en 2024 doté de 160 millions d’euros pour la réhabilitation de 10 000 logements sociaux montre l’importance des actions en réhabilitation du parc. Si la TVA dans ce cadre est ramenée à 5,5%, l’exonération systématique de TFPB sur les immeubles concernés sans décision locale interroge les territoires.
À moyen terme, le ministre a souhaité rappeler le rôle pivot des bailleurs sociaux dans l’aménagement durable des territoires. Au-delà des constructions neuves et des réhabilitations, Patrice Vergriete a souhaité que soit ouvert le chantier des reconversions/ changements d’usage, que les partenariats entre bailleurs et acteurs privés soient renforcés et que le modèle d’attribution des logements sociaux vise à une obligation de résultats pour mieux défendre la mixité sociale et l’accès au parc des plus modestes. Le chantier des mobilités résidentielles dans et hors du parc doit être réengagé.

Enfin pour clore ce corpus d’annonces, le ministre a réaffirmé souhaiter travailler sur une loi logement qui ouvrirait le champ de la décentralisation, s’inscrivant dans les objectifs portés par France urbaine et les territoires. Ce mouvement porterait une ambition de clarification du statut des Autorités organisatrices de l’habitat (AOH) en simplifiant les conditions de leur mise en œuvre pour les métropoles, les communautés urbaines, les communautés de communes les plus importantes et les départements dans les territoires où une carence pourrait être constatée.

Sur cette base, les collectivités AOH porteraient en cohérence les politiques d’aide à la pierre d’agrément, d’aide à la rénovation thermique et énergétique, d’encadrement des loyers, des prix fonciers et de développement des meublés touristiques. Mais cette décentralisation ne doit pas s’accompagner d’un désengagement de l’État, bien au contraire : contrôle de la mise en application de la loi SRU, définition des objectifs de production de logements sociaux, gestion du DALO, direction des ORCOD-IN, portage de l’hébergement et de l’hébergement d’urgence doivent rester dans le giron de politiques et d’orientations nationales.

Afin de préparer cette loi, Patrice Vergriete propose la mise en œuvre de conventions territorialisées multipartites, dont les contours restent à préciser, mais qui engageront Etat et collectivités sur les déclinaisons locales des politiques de l’habitat. France urbaine accueille favorablement ces propositions et prendra part au débat à venir. Le travail se poursuit.

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