Actualité Lutte contre les discriminations

BUDGÉTISATION SENSIBLE AU GENRE : UNE MOBILISATION DES VILLES POUR L’ÉGALITÉ

À l’occasion des Journées Nationales de France urbaine, la Budgétisation sensible au genre (BSG) a été mise en perspective par plusieurs représentants de collectivités et grands témoins, à travers des actions et des initiatives qui, localement, demandent un engagement politique et technique commun.

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BSG : état des lieux  

Outil innovant au service de l’inclusion, la Budgétisation sensible au genre (BSG) prend ses marques à tous les niveaux : sous impulsion européenne du gender mainstream, les collectivités territoriales françaises se lancent depuis plusieurs années pour intégrer leur stratégie budgétaire dans une démarche d’égalité.

La BSG permet une lecture de l’utilisation des deniers publics en fonction de leur impact sur les femmes et les hommes. Si elle révèle un peu plus l’influence des dynamiques budgétaires sur tout un ensemble de politiques publiques au service de l’égalité, la BSG traduit la responsabilité politique des exécutifs locaux en termes d’égalité entre toutes et tous. Elle permet de prolonger cette responsabilité auprès d’acteurs locaux disposant d’un impact social significatif sur le territoire, en particulier le tissu associatif sportif et culturel.  

À l’occasion d’un atelier dédié, France urbaine a convié Sylvie Tomic, adjointe au maire de Lyon, chargée de l’Accueil, de l’Hospitalité, Droit, Égalité, Mémoire, Cultes et Spiritualités, Lorine Boitelle, directrice adjointe de la culture à la Ville et l’Eurométropole de Strasbourg et Claudy Vouhé, responsable des programmes à l’association l’Être égale en tant qu’intervenantes pour mettre un point d’honneur à la BSG en tant qu’objet politique et administratif, et surtout sociétal.  

Claudy Vouhé a rappelé que la première BSG a été lancée en 1984 en Australie, bien avant le lancement de la BSG en France… en 2021. Aujourd’hui, beaucoup de BSG sont à répertorier dans les Balkans, poussé par la société civile, ou encore dans des pays africains comme le Rwanda (vigilance/surveillance budgétaire), le Maroc avec un centre d’excellence sur la BSG (formation, outils…).

En France, elle estime qu’il est “intéressant de voir que les collectivités locales sont motrices”, avec l’État qui a lancé des expérimentations via le prisme de la culture notamment mais sans réelles suites depuis. Elle a estimé que le sujet de l’égalité F/H était ni plus ni moins un des volets de la “résilience” sur lequel les villes et métropoles planchait, tandis qu’elle estime indispensable de garder ce regard de l’égalité dans une situation de crise budgétaire qui aura des répercussions sur les inégalités de genre.   

Comment les stratégies budgétaires s’affirment-elles comme des alliés de choix pour l’égalité ?  

L’atelier BSG, en guise de benchmark, a permis notamment à Sylvie Tomic de présenter le dispositif de BSG lancé par la Ville de Lyon depuis 2020. Avec un appui politique assuré par elle et l’adjointe aux finances, Audrey Henocque, la démarche est co-portée par la mission égalité et hospitalité, par la direction des finances et du contrôle de gestion, avec l’appui des directions opérationnelles concertées, et une Assistance à maîtrise d’ouvrage (AMO) en début de phase pour définir la méthode à employer.

Des formations pour les agents des directions concernés sont lancées initialement, en parallèle d’une analyse du budget par une tricatégorisation : dépenses neutres (pas d’impact particulier sur les inégalités), les dépenses volontaristes (œuvrer à l’égalité des femmes), les dépenses genrables (majorité des dépenses de la collectivité).  

Au sein des dépenses genrables, il s’agit ensuite d’observer plus finement de quelle manière l’argent va plus aux hommes qu’aux femmes (les équipements sportifs par exemple : budget fonctionnement comparé ensuite par des analyses de fréquentation par les hommes et les femmes, ou encore la culture avec la place des femmes dans la programmation des festivals ou dans l’acquisition des œuvres d’arts produites par les femmes artistes).

Une réflexion que porte également la Ville et l’Eurométropole de Strasbourg qui, par la note de cadrage budgétaire et une annexe incitant à effectuer une critérisation sensible au genre de l’ensemble des lignes budgétaires, permet de sensibiliser les services (sous couvert d’une offre de formation et d’accompagnement des agents en parallèle) aux répercussions budgétaires sur l’égalité. La direction de la culture, représentée par sa directrice adjointe, Lorine Boitelle, dispose d’ailleurs d’une misse “culture et transitions” qui est chargé de mettre les effets de la BSG en application.  

“On essaie de se mettre là où vous êtes” 

Parmi les leviers afférents à la BSG justement et aux mains des collectivités : l’éga-conditionnalité. Les villes et métropoles embarquent par ce levier les associations sportives et culturelles pour mieux investir l’égalité d’accès et garantir une plus grande égalité fiscale dans l’attribution des financements publics. Si l’éga-conditionnalité est plutôt investie en tant que moyens, les villes comme Strasbourg souhaitent justement en faire un dispositif d’accompagnement des associations et des acteurs du territoire, avec en tout état de cause un besoin d’accompagnement et de progressivité dans les objectifs sollicités et les moyens à mettre en œuvre par les structures associatives.  

Sur la culture, la Ville et l’Eurométropole ont scruté le “dispositif d’aide à la production littéraire” en tentant de rendre davantage effective l’attribution des bourses aux femmes, une démarche similaire sur le sport concernant la sollicitation de bourses pour la pratique physique et sportive, majoritairement mobilisées par les garçons.

La collectivité, pour la culture comme pour le sport, plutôt que de contraindre des critères, a effectué un travail de communication et d’aller-vers, voire d’empowerment pour sensibiliser les filles et femmes à leur capacité et leur légitimité à pouvoir prétendre à ces aides. Des démarches que l’on retrouve dans d’autres collectivités comme Bordeaux, qui souhaite également travailler sur les investissements (réfléchir à la spacialisation des équipements sportifs sur le territoire, afin que les femmes se sentent davantage sécurisées et légitimes à faire du sport dans les équipements sportifs, dans l’espace public…).  

Une dynamique neutre et activable : c’est certainement l’un des messages qui doit le plus incarner la mise en place de la BSG, avec des gages de facilitation dans sa mise en place et la possibilité de bénéficier de résultats rapides dans sa mise en œuvre. France urbaine souhaite pouvoir prolonger cette dynamique et l’abriter sous le groupe de travail “lutte contre les discriminations”, avec des réflexions à prolonger avec différentes commissions thématiques dont celles du sport, de la culture ou encore de l’éducation.

Louise Cornillere
l.cornillere@franceurbaine.org
Sébastien Tison
s.tison@franceurbaine.org
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