BILAN DE L’INTERCOMMUNALITE : FRANCE URBAINE VIGILANTE SUR LES CONCLUSIONS DU RAPPORT SENATORIAL
Dix ans après les lois MAPTAM et NOTRe, le Sénat a publié, le 25 septembre dernier, un rapport d’évaluation de l’intercommunalité. Fruit des travaux d’une mission d’information, ce document dresse un bilan nuancé du fonctionnement des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), en assumant, à juste titre, d’extraire les grandes agglomérations et métropoles du champ d’analyse. En effet, sur ces territoires à l’histoire intercommunale ancienne, le degré de maturité atteint à de longue date permis de répondre aux éventuelles difficultés, majoritairement transitoires, exprimées par le rapport. Si certaines analyses rejoignent les constats portés de longue date par France urbaine, plusieurs propositions formulées par les rapporteurs appellent à la vigilance.

Une reconnaissance salutaire de l’efficacité intercommunale
Le président de la mission d’information, Jean-Marie Mizzon, et sa rapporteure, Maryse Carrère, reconnaissent que le fonctionnement des intercommunalités est globalement satisfaisant. Mieux encore, ils affirment que, bien que cette organisation demeure jeune et en cours de maturation, elle favorise l’investissement public local et garantit une efficacité accrue par rapport à l’échelle strictement communale. Un constat que ne peut que partager France urbaine, qui rappelle régulièrement que la construction intercommunale, bien qu’exigeante et progressive, permet d’améliorer durablement le service rendu aux citoyens, en particulier dans un contexte où les exigences de performance et de rationalisation de l’action publique sont renforcées. Un constat d’ailleurs mis en avant par le Sénat : « [lorsque les élus l’ont été pour la première fois] lors du dernier scrutin municipal et ont par conséquent toujours vécu sous ce régime […] leur appréciation est nettement moins négative que chez les élus de longue date ».
Des propositions fragilisant la logique d’intégration
Cependant, derrière cette reconnaissance, le rapport ouvre la porte à une série de recommandations qui, sous couvert d’« ajustements » et s’ils étaient généralisés, pourraient fragiliser la structure même de l’intercommunalité. A ce titre, France urbaine partage la prudence du Sénat qui affirme « la difficulté [qu’il y aurait] à définir des règles uniques destinées à s’appliquer de manière indifférenciée à l’ensemble des structures intercommunales ». D’autant, comme le précisent également les rédacteurs, que « nul ne demande ni même n’évoque un retour à la situation antérieure aux lois MAPTAM et NOTRe » .
En effet, le Sénat se fait souvent l’écho d’un sentiment de dépossession exprimé par certains maires face à leur intercommunalité. A cet égard, France urbaine rappelle que pour les métropoles et grandes agglomérations, l’intégration intercommunale s’est accompagnée de dispositifs de territorialisation permettant de mieux articuler action intercommunale et action communale, à travers des outils comme les contrats de codéveloppement ou les pôles territoriaux.
Bien qu’affichant le souhait de ne pas remettre en question le bienfondé même des intercommunalités, le rapport réactualise certaines propositions qui, si elles trouvaient à se concrétiser de manière indistincte, fragiliseraient de fait le fonctionnement intercommunal : transferts de compétences « à la carte », restitution de compétences aujourd’hui obligatoires, réaménagements locaux de la répartition des compétences ou facilitations des scissions, etc.
Autant de mesures qui, selon France urbaine, aboutiraient à remettre en cause la construction intercommunale dont le rapport souligne pourtant à maintes reprises la puissance en matière de pertinence de l’action publique (le rapport pointant « la meilleure capacité des EPCI à répondre aux besoins de la population »), mais aussi en termes d’efficience : « l’augmentation des dépenses est d’ailleurs plus faible au sein des intercommunalités les plus intégrées ».
Alors que les discussions sur une nouvelle étape de la décentralisation s’intensifient, et dans un contexte budgétaire de plus en plus contraint pour les collectivités, France urbaine enjoint à dépasser les clivages entre niveaux de collectivités et à recentrer le débat sur les moyens alloués à l’ensemble du bloc local. Pour l’association, l’expérience des territoires urbains doit servir d’inspiration afin de construire un modèle de gouvernance plus intégré, plus lisible et plus efficace, au bénéfice de tous les citoyens.