Actualité Fonction publique territoriale

ATTRACTIVITÉ DE LA FONCTION PUBLIQUE : DE L’URGENCE D’AGIR

En décembre 2021, France urbaine, dans une contribution au rapport Icard-Laurent-Desforges sur l’attractivité de la fonction publique territoriale (FPT), qualifiait ce sujet d’ «enjeu majeur pour le service public local » et formulait 12 propositions. Trois ans déjà après la publication de cette contribution et la remise de ce rapport, c’est un nouveau rapport, intitulé Travailler dans la fonction publique : le défi de l’attractivitéet publié par France Stratégie, qui vient rappeler l’acuité de cette problématique et l’urgence d’une action globale et cohérente…

 

 

 

 

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Un double message, d’alerte et d’action, au terme d’un important travail

Sous le titre Travailler dans la fonction publique : le défi de l’attractivité, France Stratégie a publié le 9 décembre un rapport extrêmement complet et documenté sur les problèmes d’attractivité que rencontrent les métiers du service public.

Au terme de 18 mois de travail, mêlant entretiens et « focus groups », la structure rattachée à Matignon mais dont toute publication prend soin de mentionner que « les opinions exprimées engagent leurs auteurs et n’ont pas vocation à refléter la position du gouvernement », livre un double message.

Tout d’abord, « un message d’alerte » concernant les trois versants : 15 % des postes offerts aux concours de la fonction publique d’Etat sont demeurés non pourvus en 2022 ; 21 % des lits de l’APHP sont restés fermés la même année dont 70 % par manque de personnel ; 62 % des collectivités territoriales signalent au moins un champ professionnel en tension en 2023.

Les auteurs tiennent à souligner le caractère inédit d’une crise « structurelle et durable », « amorcée depuis une dizaine d’années et d’une nature et d’une ampleur nouvelles », alertant sur le fait qu’elle risque encore de s’aggraver sans pour autant qu’il ne faille y voir de fatalité : le rapport mettant en exergue les atouts de la fonction publique qu’il convient « de renforcer et de mobiliser ».

Ensuite, un message « d’action » au travers de la nécessité exprimée d’une « stratégie globale d’attractivité » mobilisant l’ensemble des leviers : « image, reconnaissance, évolutions de carrière, rémunération, qualité de l’emploi et des conditions d’exercice ».

Aussi, à rebours, pour une bonne part, du discours public intervenu ces quelques derniers mois, les rapporteurs en appellent :

  • à un « discours de revalorisation de la fonction publique» ;
  • à une « action pour mieux faire connaître la fonction publique» ;
  • à une « consolidation des atouts et éléments d’attractivité de la fonction publique».
Des propositions largement en écho aux travaux de France urbaine

Sur le fond des réflexions, on retiendra du rapport une grande convergence avec les travaux de France urbaine, au premier rang desquelles les 12 orientations que l’association avait formulées en décembre 2021 dans sa contribution :

Mais c’est aussi le cas de travaux plus précis qu’avait menés la commission Ressources Humaines et Fonction Publique Territoriale de France urbaine.

Tel est le cas de la question de la structure du système de rémunération des agents publics.

Ainsi, France Stratégie souligne que «la complexité du système de rémunération participe vraisemblablement au manque de lisibilité des perspectives salariales, et ce faisant, à la perte d’attractivité » et que «celle-ci résulte notamment de la variabilité de l’équilibre entre les composantes indiciaires et la part indemnitaire, de la diversification des statuts salariaux entre fonctionnaires et contractuels, ou encore de la multiplicité des mécanismes intervenant dans la revalorisation.»

Les auteurs estiment que «répondre à la perception d’un déclassement salarial – et ce faisant social – de la fonction publique ne peut vraisemblablement se faire, de façon isolée ou ponctuelle, sans repenser l’architecture globale des rémunérations ni en ignorant la façon dont ce déclassement prend racine dans l’évolution des statuts, ou de la capacité à faire son travail dans de bonnes conditions ».

De telles réflexions étaient précisément au cœur de la contribution de France urbaine à la conférence sur les perspectives salariales de la fonction publique, en 2022.

Tel est le cas également sur la question du logement. Là aussi, les auteurs du rapport soulignent l’acuité de cet enjeu pour la capacité à recruter dans la fonction publique, enjeu sur lequel France urbaine a eu l’occasion de formuler des propositions précises et opérationnelles dans sa contribution publiée en décembre 2023 et intitulée Logement des agents publics : pour une ambition à la hauteur des enjeux.

Des constats hélas largement connus depuis plusieurs années mais restés sans réponse cohérente et globale

Si de nombreux acteurs, notamment du dialogue social, ont accueilli avec beaucoup d’intérêt ce rapport très complet et riche, on ne manquera pas de relever que ses constats rejoignent des éléments de diagnostic largement connus et qui ont émaillé à la fois des contributions au débat public, notamment celle de France urbaine en décembre 2021, et des rapports officiels, tel que celui remis en 2022 à Amélie de Montchalin, à l’époque ministre de la Transformation et de la Fonction publiques par Mathilde Icard, Philippe Laurent et Corinne Desforges sur l’attractivité de la FPT.

Depuis trois ans, et malgré aussi les propositions plus récentes des employeurs territoriaux, notamment celles exprimées en octobre 2023 dans une contribution au chantier Accès, Parcours et Rémunérations (APR), impulsé par Stanislas Guerini, les acteurs ont été ballotés entre des chantiers inaboutis, notamment – mais pas uniquement – du fait de l’instabilité politique, une insuffisance d’approche d’ensemble et de cohérence et, plus récemment, l’absence d’association à un quelconque chantier en la matière et – pire – des discours publics susceptibles de contrevenir à une revalorisation des métiers du service public et de leur attrait.

Sur ce dernier point, ainsi que le soulignaient les employeurs territoriaux dans un communiqué publié le 20 novembre dernier à l’occasion du Congrès des maires, ceux-ci « craignent que les effets contreproductifs des récents discours viennent dégrader l’image de la fonction publique et de ses agents, notamment auprès des potentiels futurs candidats et des jeunes générations » et pointent « une profonde contradiction à tenir ces discours et à prétendre continuer de proclamer l’attractivité comme priorité », avec le risque, à la clé, de remettre en cause l’ensemble des actions locales mise en œuvre par de nombreux employeurs ces dernières années.

Il y a trois ans, la contribution de France urbaine se concluait sur ces mots : « Ainsi, au-delà des propositions formulées ci-après, les employeurs urbains en appellent à la nécessité de faire prévaloir dans le débat public un discours résolument positif et constructif sur la fonction publique territoriale, fondé sur le sens de l’engagement et accompagné d’un consensus renouvelé sur les valeurs du service public. »

Des mots qui résonnent pleinement avec l’actualité récente et dont l’expression doit être réitérée, avec l’espoir que le portage gouvernemental des enjeux de la fonction publique soit au rendez-vous de cette exigence d’un discours mais aussi d’une action positifs.

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