Actualité Solidarités et cohésion sociale

IL EST TEMPS DE RECONNAÎTRE LA MÉDIATION SOCIALE COMME UN MÉTIER À PART ENTIÈRE

Retrouvez la tribune signée par France urbaine et plus de 500 personnalités. Ils appellent à donner un statut professionnel aux douze mille médiateurs sociaux, véritable “clé de voûte de notre cohésion sociale”.

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Dans une société en profonde mutation, de nombreux Français sont confrontés à des enjeux majeurs : la précarité, l’exclusion de l’emploi, l’isolement, ou encore la fracture numérique… Ces phénomènes, qui contribuent à fragiliser le lien social, ont amplifié le sentiment d’abandon et de marginalisation ressenti par les habitants, particulièrement dans les territoires les plus en difficulté : quartiers prioritaires de la politique de la ville, zones périurbaines, territoires ruraux, territoires ultramarins. Face au délitement du lien social, le renforcement de la présence humaine active de professionnels contribuant à la cohésion sociale sur le terrain apparaît comme indispensable. L’ensemble des travailleurs et des intervenants sociaux – notamment les acteurs de proximité que l’on nomme les médiateurs sociaux – est la clé de voûte de notre cohésion sociale.

Les différentes crises économiques et sociales ont mis en évidence le rôle essentiel de ces acteurs dans le maintien du lien entre l’individu et la société. Durant tous ces moments difficiles, ils n’ont jamais quitté le terrain, arpentant les rues afin de poursuivre un dialogue permanent avec les populations inquiètes de leur situation et de leur devenir. Ils ont su faire preuve d’adaptabilité et de réactivité pour répondre à leurs besoins, comme ils savent si bien le faire chaque jour.

Les conséquences sociales de ces différentes crises ont contribué à l’aggravation des conditions de vie des plus précaires et vont accentuer dans les mois à venir les besoins de solidarité et de soutien d’un grand nombre de nos concitoyens, mais aussi la nécessaire implication de chacun dans le vivre et le faire-ensemble.

Accompagnement des transitions

Depuis maintenant plus de quarante ans, la médiation sociale s’est progressivement enracinée dans le paysage institutionnel. Dans les territoires, elle est devenue indispensable, aussi bien pour l’accompagnement des habitants dans l’accès aux droits et aux services, du fait d’une dématérialisation galopante des services publics devenus pour la plupart inaccessibles par la fermeture des accueils, que pour le maintien de la tranquillité en prévenant et gérant les conflits inhérents à la vie quotidienne.

Elle est aussi essentielle pour l’accompagnement des transitions, qu’elle soit d’ordre économique, écologique ou social. Par leur action au plus près des populations, les médiateurs sociaux contribuent au développement des capacités de chacun dans le « faire société ».

Aussi bien dans l’espace public, l’habitat, les transports, les établissements scolaires que dans les champs de l’accès aux droits et services, l’éducation à la citoyenneté, la prévention de la délinquance ou encore l’accompagnement des transitions écologiques, sociales et numériques, le rôle des plus de douze mille médiateurs sociaux en France est reconnu par les habitants et ne souffre d’aucune contestation. Toutes les évaluations sur les résultats et impacts de la médiation sociale réalisées depuis plus de dix ans le montrent.

Car, au fil des années, la médiation sociale s’est professionnalisée et structurée, avec notamment l’élaboration d’un cadre professionnel reconnu par tous : définition, cadre déontologique, référentiel d’activités, formations, évaluation de l’utilité sociale de la médiation sociale. En 2016, ce cadre de référence commun a fait l’objet d’une norme métier expérimentale Afnor « Médiation sociale », homologuée par la suite, en 2021. Elle est le fruit d’une démarche volontaire des acteurs de la médiation sociale et la garantie d’une exigence de qualité de service sur tout le territoire.

Gouvernance, financement, formation

Malgré ces réussites, les pratiques de la médiation sociale se sont développées sans qu’aucune loi reconnaisse le métier. En dépit de leur rôle décisif, les médiateurs sociaux ne disposent légalement, à ce jour, d’aucun statut. Employés sur des programmes d’aide à l’emploi, les médiateurs sociaux accompagnent les plus fragiles et sont souvent confrontés à des situations de tension que personne ne souhaite gérer aujourd’hui.

Face à ce constat, le rapport parlementaire « Remettre de l’humain dans les territoires », rendu le 28 mars 2022 au premier ministre, Jean Castex, par Patrick Vignal, député de la 9e circonscription de l’Hérault, met en avant dix-huit propositions pour le secteur de la médiation sociale. Il souligne notamment l’absolue nécessité d’une reconnaissance par la voie législative de la médiation sociale et établit des préconisations pour améliorer sa gouvernance, sa structuration, son financement et la création d’une filière de formation pour professionnaliser les médiateurs sociaux et reconnaître le métier.

Depuis le mois de mai, une proposition de loi concernant la médiation sociale a été déposée à l’Assemblée nationale par Patrick Vignal afin de fixer clairement le cadre, les objectifs et les modalités d’action de la médiation sociale et d’offrir, enfin, aux professionnels du secteur une reconnaissance officielle. Une centaine de députés ont déjà cosigné cette proposition de loi.

C’est pourquoi nous, les professionnels et les élus en charge de la médiation sociale, soutenons cette proposition de loi et appelons les députés et sénateurs de tout bord politique à reconnaître la médiation sociale comme un métier à part entière et à donner officiellement un statut professionnel aux médiateurs sociaux, dont le caractère crucial des interventions n’est plus à prouver !

Xavier Rochefort, président de France Médiation ; Mohamed Chihi, adjoint au maire de Lyon ; Sébastien Cote, adjoint au maire de Montpellier ; Dalila Duwez-Guesmia, maire de Lourches (Nord) ; Pierre Hurmic, président du Forum français pour la sécurité urbaine et maire de Bordeaux ; Gilles Leproust, maire d’Allonnes (Sarthe) ; Isabelle Lherbier, présidente du réseau national Pimms Médiation ; Bénédicte Madelin, présidente de LaFédé ; François Nebout, maire de Soyaux (Charente) ; Johanna Rolland, présidente de France urbaine, maire de Nantes et présidente de Nantes Métropole ; Rodolphe Thomas, maire d’Hérouville-Saint-Clair (Calvados).

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