INDUSTRIE ET ATTRACTIVITÉ – L’USINE EN VILLE, LEVIER D’UNE SOUVERAINETÉ INDUSTRIELLE DURABLE
Dans le cadre de l’atelier « Industrie et attractivité » des Journées Nationales de France urbaine, les congressistes inscrits à ce temps d’échange ont visité les locaux du cluster Mecateam à Montceau. Cette rencontre, en présence du PDG d’EDF, Bernard Fontana, a permis de travailler sur la notion d’écosystème industriel territorial et d’identifier plusieurs « bonnes pratiques » ainsi que des pistes d’amélioration pour les territoires souhaitant contribuer à la consolidation du socle productif français.
Un territoire emblématique des défis de la réindustrialisation
L’histoire industrielle du Creusot-Montceau fait pleinement écho aux tendances et tensions que connaît aujourd’hui le défi de la réindustrialisation en France et en Europe. Victime de la déprise industrielle française des années 2000, le territoire se retrouve désormais en première ligne des dynamiques visant à reconstruire une souveraineté industrielle et énergétique. L’implication de l’ensemble de l’écosystème local constitue une condition indispensable à la réussite de cette relance.
L’émergence, il y a une dizaine d’années, dans l’ombre des grands comptes industriels, d’un cluster de PME dédié à la maintenance ferroviaire illustre une conviction portée par France urbaine : la réindustrialisation de la France passera autant par la densification du tissu de PME industrielles que par l’accueil d’investissements exogènes. Fortement soutenu par le PIA puis France 2030, MecateamCluster présente la particularité de fédérer les activités de plusieurs entreprises tout en proposant un outil de formation intégré.
Créé il y a une dizaine d’années par une poignée de PME industrielles du Montceau autour de la conception et de la maintenance d’engins d’entretien ferroviaires, MecateamCluster compte aujourd’hui 150 adhérents, présents partout en France et au-delà. Il se présente comme la base d’un écosystème d’investissements collaboratifs via les programmes France 2030. Initialement tourné vers l’accès à de nouveaux marchés, le cluster s’est rapidement rapproché des collectivités pour développer des moyens mutualisés, dont un atelier commun et, plus récemment, un centre de formation. Aujourd’hui, les entreprises se sentent suffisamment solides et en confiance pour porter leurs premiers projets communs de R&D. Une trajectoire inspirante pour les acteurs publics, souvent convaincus – à tort – que l’innovation doit nécessairement être le point de départ de la création de valeur économique.
La visite d’une plateforme d’activités ferroviaires de 12 hectares — regroupant ateliers de maintenance, centre de formation et espace de coworking — a permis de matérialiser les 20 millions d’euros investis en une dizaine d’années, tout en préservant l’ADN industriel du territoire.
Aujourd’hui, la dynamique s’appuie sur une association animant l’écosystème et pilotant la présence sur les salons (dont l’un à Montceau), une SEM et deux sociétés. Le projet est en cours de réplication dans l’agglomération de Tours / Saint-Pierre-des-Corps, autre nœud ferroviaire majeur.
Quels peuvent être dès lors les fondamentaux d’une attractivité industrielle durable ?
« Une vision et un portage politique local fort sur le temps long », a indiqué Bernard Fontana, présent pendant dix ans sur le territoire lorsqu’il dirigeait Framatome. Le PDG d’EDF a également insisté sur la sécurisation de l’accès des entreprises industrielles à une énergie décarbonée et sur la constitution de réseaux d’entreprises proches et partenaires, liés localement par un “pacte de performance”.
Autre paramètre : « une maîtrise foncière publique, le déploiement de fonds d’investissement territorialisés, la capacité à proposer un emploi aux conjoints des salariés en mobilité », a souligné Laurent Vallas, directeur de JLL Régions. Il incite les territoires à s’impliquer dans la constitution ou l’abondement de dispositifs d’investissement ancrant localement les PME industrielles. Mais ces outils ne contribueront réellement à l’attractivité industrielle qu’à condition d’être adossés à des engagements concrets des acteurs locaux — publics comme privés — dans des démarches de Responsabilité Territoriale des Entreprises.
Derniers fondamentaux évoqués : « une capacité d’anticipation permettant de proposer rapidement des terrains industriels, ainsi que le partage d’ingénierie entre territoires », a ajouté Mathilde Leterrier, directrice régionale adjointe de la Banque des Territoires, opératrice de plusieurs dispositifs ayant soutenu la consolidation du cluster Mecateam. Parmi eux, Territoires d’industrie apparaît comme l’un des vecteurs de cette alliance industrielle, essentielle pour le partage d’expérience et de bonnes pratiques entre EPCI.
Un sujet reste toutefois à travailler : la mise sur le marché de grands tènements fonciers, de plus en plus rares en France.
Plusieurs intervenants et auditeurs ont enfin souligné l’importance d’une maîtrise renouvelée du foncier industriel par les collectivités — via des foncières ou l’usage systématique de baux emphytéotiques ou à construction — associée à la gestion de terrains dédiés à la renaturation pour respecter les principes de sobriété foncière et du ZAN. Autre consensus, face aux enjeux démographiques : miser sur les compétences et la formation, pour les jeunes comme tout au long de la vie.
L’ensemble de ces outils et dispositifs, pilotés localement et mis en œuvre simultanément, doit renforcer la capacité des territoires à aller vite et à devenir toujours plus réactifs dans l’accueil de projets industriels.