ADAPTATION CLIMATIQUE : FRANCE URBAINE APPELLE À PASSER DES ANNONCES AUX MOYENS CONCRETS
Le mercredi 28 mai 2025, France urbaine a été auditionnée par la Commission des finances de l’Assemblée nationale à l’occasion du « Printemps de l’évaluation », à l’invitation des députés Eva Sas et Tristan Lahais, rapporteurs spéciaux pour une partie des crédits de la mission Écologie, développement et mobilités durables.

Le printemps est la saison du contrôle budgétaire pour le Parlement et permet notamment de travailler avec une approche plus évaluatrice que strictement législative. France urbaine était représentée par Jean-Patrick Masson, vice-président de Dijon Métropole, aux côtés de l’AMF et de l’ADF, dans le cadre d’une table ronde consacrée aux moyens alloués à l’adaptation au changement climatique, et en particulier sur le troisième Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC 3).
Un plan ambitieux, mais des moyens à concrétiser
Le PNACC 3 fixe une trajectoire climatique de référence : +2 °C en 2030, +2,7 °C en 2050 et +4 °C en 2100. Il constitue une étape structurante, articulée autour de 52 mesures destinées à protéger les populations, renforcer la résilience des territoires, accompagner le monde économique, préserver le vivant et territorialiser l’action publique. Il vise à apporter une réponse systémique aux effets du changement climatique, en misant notamment sur l’adaptation du bâti, la lutte contre les îlots de chaleur, la gestion de l’eau et la renaturation.
Toutefois, la question cruciale des financements demeure non traitée pour les représentants des collectivité territoriales. Selon le Panorama des financements climat publié par l’I4CE et la Banque Postale, les collectivités devront investir près de 11 milliards d’euros par an jusqu’en 2050 pour répondre aux objectifs fixés par la planification écologique.
Jean-Patrick Masson a rappelé en particulier que ces ambitions ne pourront se traduire en actions concrètes sans ancrage local fort, financements dédiés et ingénierie adaptée. En effet, les collectivités urbaines, en première ligne face aux dérèglements climatiques, doivent pouvoir planifier et piloter des stratégies articulant atténuation et adaptation sur le long terme.
À cet égard, l’exemple du Plan Climat et Biodiversité de Dijon Métropole a été mis en avant : une démarche exemplaire qui évalue les coûts de l’atténuation et de l’adaptation à l’horizon 2050, en les rapportant au PIB local afin d’apprécier la soutenabilité et la pertinence des trajectoires choisies
De manière prospective, il a plaidé pour que les aides de l’Etat (Fonds vert, …) prennent en considération la réalité de l’ingénierie territoriale (études, animation, suivi, coordination) et puissent être, tout au moins partiellement, versées en fonctionnement. Cela permettrait de sécuriser le financement global des opérations et de mieux intégrer les aides aux programmations territoriales.
Fonds territorial climat : des alertes sur les modalités de mise en œuvre
Parmi les points de vigilance exprimés, France urbaine a enfin partagé ses préoccupations quant aux modalités de déploiement du Fonds territorial climat (FTC), dont elle a soutenu la création. Conçu comme un levier structurant pour accompagner les collectivités dans leurs projets de transition écologique, le FTC souffre aujourd’hui d’un cadre d’instruction rigide à l’encontre des objectifs de prévisibilité et d’efficacité (effet de levier) qui étaient poursuivis par le législateur et partagés par France urbaine.
Les critères imposés par certains services instructeurs de l’Etat en 2025 requièrent des projets très avancés, avec des engagements budgétaires dès l’automne, ce qui exclut de nombreuses collectivités, notamment celles dépourvues d’ingénierie. De surcroît, l’interdiction de cumul du FTC avec d’autres financements réduit fortement son impact. Les premiers retours de nos membres confirment malheureusement ces difficultés : règles trop strictes, logique d’instruction éloignée de l’accompagnement structurel attendu, absence de visibilité pluriannuelle, et sélection de projets déjà matures au détriment des territoires en construction de stratégie.
France urbaine a donc appelé au cours de cette audition à un assouplissement rapide des modalités dès cette année, et a proposé, pour 2026, une stabilisation du dispositif sur des bases claires : répartition prévisible selon la démographie et l’existence d’un plan climat-air-énergie territorial (PCAET), en vue d’en faire un véritable outil de planification territoriale.
Vers une ingénierie pérenne et une culture du risque renforcée
En conclusion de cette table ronde, les rapporteurs spéciaux ont synthétisé les attentes des associations d’élus. Ils ont souligné la nécessité d’assurer une prévisibilité pluriannuelle des financements dédiés à l’adaptation, notamment via le Fonds vert, ainsi que l’urgence de structurer et financer durablement l’ingénierie territoriale, élément indispensable de l’action locale. Enfin, ils ont relevé l’importance portée par les représentants des élus présents de renforcer la concertation entre l’État et les collectivités à chaque étape de la décision publique, tout en appelant à développer une véritable culture du risque au sein de la population, condition essentielle à la réussite des politiques d’adaptation.