BIENNALE DES VILLES EN TRANSITION À GRENOBLE : IMAGINER DES FUTURS RÉSILIENTS
Les 12 et 13 mai, France urbaine était représentée à la Biennale des Villes en Transition, organisée par la Ville de Grenoble depuis 2017 pour imaginer les transitions de demain. À l’édition 2025, des élus du Bureau ont découvert l’exposition pédagogique “La Tournée du Climat” et la fresque immersive “Grenoble 2040”, dédiée à des quartiers plus sains. Ces enjeux, en lien avec les travaux de France urbaine, ont aussi été abordés lors d’une table ronde animée par France Villes et territoires Durables.

Bureau de France urbaine délocalisé
A l’invitation d’Eric Piolle, maire de Grenoble et second vice-président de France urbaine, quelques élus du Bureau de l’association se sont déplacés à Grenoble le 13 mai, dont la présidente Johanna Rolland, maire de Nantes et présidente de Nantes Métropole, pour y délocaliser une de ses instances, dans le cadre de la Biennale des Villes en Transition. Cet évènement que la ville organise depuis 2017 est ouvert au grand public et aux professionnels afin de réfléchir et imaginer les transitions vers demain via des stands associatifs, ateliers, expositions, spectacles, concerts… Ainsi, à l’occasion de l’édition 2025 qui se déroule du 10 au 17 mai, les élus de France urbaine ont pu découvrir l’exposition pédagogique “la Tournée du Climat et de la Biodiversité” guidés par des scientifiques sur ces deux enjeux intrinsèquement liés, ainsi que la fresque immersive “Grenoble 2040”, qui met en récit un large travail mené par les services de la ville et l’agence d’urbanisme de Grenoble, en donnant à voir des projets, imaginés ou en cours, d’adaptation locale face aux enjeux environnementaux et sociaux, pour des quartiers favorables à la santé.
Table ronde : Repenser le développement économique local
La veille, Lionel Delbos, conseiller développement économique à France urbaine, s’est exprimé lors d’une large table ronde animée par France Villes et territoires Durables, pour revenir sur la manière dont les transitions, qu’elles soient climatiques, énergétiques ou numériques, transforment en profondeur les méthodes, les outils et les métiers liés au développement économique territorial.
Le constat suivant a pu être fait : quelles que soient leurs caractéristiques, tous les territoires sont impactés par les transitions et les crises actuelles. Ils font tous face à une panoplie de pénuries autour du foncier, du logement, de l’eau, de l’énergie, des finances publiques, des emplois non pourvus… alors que la transition démographique, en réduisant à terme le nombre de jeunes et notamment d’étudiants, va accroître les tensions nées de ces pénuries.
France urbaine a souligné que les élus et leurs équipes sont parfaitement conscients de devoir faire face à une friction de plus en plus forte entre l’injonction politique (créer de la valeur, de l’emploi, de l’activité économique, de l’attractivité touristique…) et l’impératif de préservation des ressources. Cette friction est à l’origine d’un foisonnement de travaux universitaires (économie régénérative, théorie du donut…) qui commencent à se décliner territorialement et qui amènent à reconfigurer l’ingénierie locale du développement économique et à repenser le métier de développeur, qu’il soit élu, agent des collectivités ou salariés des agences de développement ou d’attractivité.
Et si les acteurs publics ne s’engagent pas dans ces évolutions profondes, ils risquent de céder au désarroi créé par l’empilement des crises et la fragilisation du lien fiscal entre l’entreprise et les collectivités locales.
Ont été mentionnés par un des intervenants les travaux particulièrement intéressants du programme de recherche-action Rebonds impliquant notamment la 27ème Région, Intercommunalités de France, l’université de Grenoble / Laboratoire Pacte, l’Ademe, Fondation de France etc. Ces derniers ont mené des réflexions depuis deux ans autour d’une douzaine d’études de cas d’où ressortent les quatre axes de transformation de l’action publique suivants :
- Tous les territoires ne sont pas égaux devant les défis de la transformation de l’action économique ; leur positionnement, leurs forces économiques, leur accessibilité les différencient quant à l’impact des crises actuelles comme dans les solutions engagées pour bifurquer ; et les inégalités constatées transcendent les différences habituelles entre grandes métropoles et territoires ruraux, entre centres et périphéries, entre territoires « naturellement » attractifs et ceux qui restent en marge des développements en cours ; face à ces disparités et divergences, il ne peut pas y avoir un modèle unique de bifurcation,
- Les développeurs économiques territoriaux doivent faire évoluer en profondeur leur portefeuille de compétences : les questions d’accès aux ressources (eau, sol, énergie, talents…), d’accès à la commande public, aux engagements territoriaux ou à l’offre de formation sont au cœur de la relation entre les entreprises et les acteurs publics ; le parcours de formation, initiale et continue, est à réviser largement,
- La question sociale (re)devient centrale : réassurer, rassurer et proposer aux entrepreneurs de nouveaux récits territoriaux suppose d’embarquer les thématiques sociales et de mettre les démarches d’accès à l’emploi, de réduction des inégalités ou d’accès à l’enseignement supérieur au cœur des politiques locales de développement économique,
- Enfin, la question d’un accès local et circularisé aux ressources oblige à dépasser les frontières administratives (notamment intercommunales) et d’appréhender la transformation économique à l’échelle inter-territoriale.
Ces transformations engagent les métiers du développement économique et notamment le rôle et les compétences des élus et de leurs organisations. Avec une finalité : ne plus faire du développement économique une fin en soi mais une politique publique au service de la transition et de la résilience des territoires et de leurs habitants. Créer la nouvelle robustesse des écosystèmes économiques locaux, représente ainsi un défi majeur pour les acteurs publics.
Table ronde : renforcer les transitions au service des quartiers prioritaires
Dans le cadre de la Biennale, une autre table ronde a également permis de mettre en exergue les enjeux cruciaux des transitions écologique et économique au bénéfice des habitantes et habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Cette séquence, à laquelle ont participé Gilles Leproust, président de l’association Ville & Banlieue, Éric Piolle, maire de Grenoble, Anne-Claire Mialot, directrice générale de l’ANRU, et Annick Bousba, directrice de structures socio-culturelles, a été l’occasion de souligner l’urgence de renouveler les missions de l’ANRU au-delà de l’échéance des actuels engagements fixés à 2026.
Cette nécessité s’inscrit dans la continuité des positions défendues par France urbaine à travers la récente publication de l’étude sur l’avenir de l’ANRU. Les interventions de l’agence jouent un rôle déterminant, tant pour lutter contre les îlots de chaleur dans les quartiers prioritaires que pour améliorer le confort thermique des logements, enjeux devenus majeurs face aux dérèglements climatiques.
Par ailleurs, dans un contexte où le taux de chômage reste structurellement plus élevé dans ces territoires que la moyenne nationale, les dispositifs d’insertion professionnelle annexés aux conventions ANRU apparaissent comme des leviers puissants pour articuler cohésion sociale et transition écologique à l’échelle locale.
Enfin, les intervenants ont exprimé leur préoccupation face au nouveau report du Comité Interministériel des Villes (CIV). Ce recul intervient alors même que les élus et les acteurs de la politique de la ville se mobilisent depuis plusieurs mois pour formuler des propositions opérationnelles à destination du gouvernement. Ce report met en suspens des décisions attendues pour consolider les dynamiques engagées dans les quartiers.