DES BUDGETS VERTS À LA COMPTABILISATION DES INVESTISSEMENTS VERTS
Quatre ministères ont chargé la Direction Générale des Collectivités Locales (DGCL) en avril 2023 de mettre en place une « méthodologie commune d’un budget vert des collectivités locales ». Une ambition qui n’a pas manqué d’étonner, dans la mesure où une telle méthodologie existe déjà depuis 2020 : coconstruite par 5 collectivités membres de France urbaine (la Ville de Lille, la métropole de Lille, la Ville de Paris, l’Eurométropole de Strasbourg, la métropole de Lyon) et l’Institut de l’économie pour le climat, I4CE, et elle est aujourd’hui largement utilisée, comme en atteste le récent bilan d’étape réalisé par I4CE ou, pour France urbaine, le « taux de fréquentation » de son GT budgets verts, qui s’est réuni à une vingtaine de reprises depuis sa création en mars 2021. Certaines collectivités ont par ailleurs choisi d’aller plus loin en affinant leurs analyses d’impact (ex : budgétisation de la transition écologique de la métropole de Lyon) ou en y ajoutant une dimension sociale (ex : analyse socio-environnementale de la Ville de Clermont-Ferrand).
Quels sont dès lors les objectifs poursuivis par cette initiative, et de quoi la généralisation des budgets verts serait-elle le nom ? S’agit-il de généraliser la méthodologie « 6 axes » de l’État – pourtant peu adaptée aux collectivités -, pour lui permettre de « colorier » les dépenses attachées aux différents concours financiers que celui-ci verse aux collectivités ? D’amplifier la dynamique en faveur de la budgétisation verte, en mettant des ressources à disposition des collectivités, notamment de celles qui disposent le moins de capacité d’ingénierie pour se lancer ? De mieux « parler » aux établissements bancaires, eux-mêmes soumis à la production des reportings extra-financiers de plus en plus détaillés ? De construire un agrégat national permettant d’évaluer annuellement de façon consolidée les dépenses alignées avec la stratégie nationale bas carbone ?
Vers une comptabilisation des investissements verts
Alors que la mission DGCL poursuit ses travaux, le projet d’amendement au Projet de Loi de Finances (seconde partie du PLF 2024) préparé par le Gouvernement – lequel devrait être défendu par David Valence, président de la Délégation aux collectivités de l’Assemblée nationale – vient dissiper les craintes d’une généralisation autour d’une méthodologie unique. Objet de plusieurs échanges avec France urbaine, son ambition est revue à bon escient à la « création d’un état annexé intitulé « mesure de l’impact environnemental du budget » [recensant] les dépenses d’investissement qui, au sein du budget, contribuent négativement ou positivement, à l’objectif d’atténuation du changement climatique, à tout ou partie des objectifs environnementaux [de la taxonomie européenne] ».
Pour la commission des finances de France urbaine, réunie le 18 octobre 2023, cette approche plus pragmatique est globalement conforme au souci de l’association d’aller vers une logique de comptabilisation, et non d’obligation de budgétisation verte.
La comptabilisation des investissements contribuant au respect de la stratégie nationale bas carbone apparaît pertinente : il n’existe aujourd’hui aucun indicateur permettant, par exemple, de comptabiliser nationalement les dépenses associées aux travaux de rénovation énergétique des bâtiments. C’est pourquoi, France urbaine et I4CE ont coconstruit une grille d’analyse simplifiée permettant de comptabiliser les dépenses d’investissement alignées Stratégie Nationale Bas Carbonne, axe atténuation, centrée dans un premier temps sur quelques « objets » bien identifiés : rénovation énergétique des bâtiments, mobilités douces, etc.
Ce projet, bénéficiant des réflexions du groupe de travail Budget vert de de France urbaine a été partagé avec le ministère des finances publiques.
Sa mise en œuvre opérationnelle pourrait par ailleurs être facilitée par une révision ou une adaptation des nomenclatures fonctionnelles (principalement) et par nature (plus marginalement) pour identifier plus facilement les dépenses considérées comme « vertes » par défaut.
Dans la perspective de la suite de l’examen parlementaire du PLF, France urbaine rappellera sa convergence avec les objectifs visés par l’amendement d’origine gouvernementale et proposera des ajustements rédactionnel afin, d’une part, de limiter, dans un premier temps, l’analyse au seul axe « atténuation » et de circonscrire l’exercice au niveau du compte administratif.